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J'ai voulu revoir... "Shame"

Shame

Steve McQueen


Maman, je ne pourrai pas ne pas faire de cinéma dans ma vie.”

Ah bon ?


Et oui. J’ai 14 ans, et je viens de découvrir Shame. Ça fait presque un an que je me suis lancé dans une vaste entreprise, celle de voir tous les films du monde. Je procède simplement : un(e) acteur/actrice ou réalisateur/réalisatrice me plaît, et je me fais toute sa filmographie disponible en streaming. Depuis une semaine, je suis sur celle de Michael Fassbender, que je connaissais de X-men, mais que j’avais véritablement découvert par hasard dans le chef d’oeuvre de Danny Boyle Steve Jobs, à ce jour encore un des films les plus surprenants et sous-côtés que j’ai pu voir.


Alors c’est parti pour Michael Fassbender, donc. Et il faut s’en taper du blockbuster de merde avec lui, Prometheus et autres Cartel… Jusqu’à arriver sur cette affiche attirante, un homme nu sous sa couette toute bleue. À ce moment déjà le cinéma commençait à me gratter. Le film commence. Une seconde plus tard, générique.  Je suis convaincu d’avoir vu le plus grand film de tous les temps.


"New York, Neeeew Yooooork"


Je l’ai revu donc. À peu près deux fois par an depuis, pour ne pas trop m’en gaver. Donc, 4 ans plus tard, je le revois pour la 8-9ème fois. Cette fois-ci pour écrire cet article. Et ce n’est pas à proprement parler le plus grand film de tous les temps. Mais qu’il m’est dur de m’y résoudre quand je suis devant.


J’ai dû le montrer à une dizaine de proches. C’est toujours le premier film que je cite quand on me demande mon film préféré, ou qu’on m’en demande un à regarder. Les réactions sont sensiblement toujours les mêmes : Ça plaît, ça ne bouleverse pas. Bon. Tant mieux. Alors il n’appartiendra qu’à moi.

Je le citerai avant Le Parrain, trop impersonnel. Avant Eternal Sunshine of the Spotless Mind, trop facile.


Je le résumerai ainsi : c’est l’histoire d’un mec accro au sexe et à la masturbation. Le pire résumé qu’il soit, et j’en jouerai. Car comme pour tout très bon film qui se respecte, l’histoire synopsisée (oui, Crusoa  = néologisme) n’est qu’un prétexte pour - FAIRE DU CINEMA PUTAIN C’EST TROP BIEN ON PEUT METTRE À L’IMAGE ABSOLUMENT TOUT CE QU’ON A DANS LA TÊTE DE LA FAÇON QU’ON VEUT - raconter des émotions, des idées. Donc, comme toujours, et comme pour tout le monde (hein toi lecteur ouais ouais j’te vois là) on s’en fout de l’histoire.


Et ça tombe bien, parce que si l’histoire m’importait, j’aurais probablement pas regardé celle d’un bourgeois maniaque New Yorkais qui se tape des queues et des putes à longueur de temps et dont la soeur débarque chez lui donc oh trop triste il peut plus se branler les couilles tranquille et préférait sa solitude mais en fait non mais en fait il sait pas, bon.


 

Je ne sais rien de l’élaboration de ce film. Mais ce que j’ai compris, c’est que Steve McQueen, le réalisateur, artiste contemporain de formation, s’amusera à faire de ce postulat bidon un film à la sauce de toutes les épices qu’il aime : comme des instants démesurément longs, simplement basés sur des regards et des silences. Tellement longs qu’ils sont absurdes. Presque gênants, presque drôles. Pourtant, on ne devrait pas avoir le droit de faire ça au cinéma, déjà parce que c’est trop loooong, puis parce que ça n’arrive jamais dans la vraie vie !


 

Ensuite, on change de rythme, autre épice appréciée de Steve, mon Stevou. on s’attaque à un plan-séquence filmé à l’épaule au milieu de la foule. Puis on change de cadre, et on comprend déjà que la chronologie va se foutre de notre gueule. Fantastique. On ne sait plus où on est, on est perdu, comme notre personnage, qui vient de perdre de vue celle qu’il toisait depuis l’ouverture du film. Et ensuite, comme tous les films également, ça ne se raconte pas, ça se regarde. Ce qui me rappelle d’ailleurs que je me confronte de plus en plus à la difficulté qu’est d’écrire des articles sur le cinéma quand on ne supporte pas d'en parler.

Alors je vais tout de même m’efforcer d’en parler un peu. On a le droit de tricher un peu et de parler de ce qu’on a ressenti devant certains plans si on insiste vraiment pour parler de cinéma.


Disons 3 plans importants. Mais alors sans en dire du bien.

  • Le plan-séquence au restaurant où Fassbender a un premier date avec une de ses collègues de travail. C’est un plan-fixe, de bien 8 minutes, ils n’occupent pas une place très importante à l’image, et se disent surtout des banalités. Ils se coupent la parole, flirtent maladroitement, et s’amusent ensemble de la lourdeur du serveur. Ça nous renvoie directement au film précédent de McQueen, Hunger, déjà avec Fassbender. Patte du réal, donc.

  • Carey Mulligan, merveilleuse actrice qui interprète la soeur excentrique de Fassbender, arrive à le convaincre de venir la voir chanter dans un bar hyper Classe. Il y va un peu à reculons, flegmatique et mystérieux comme à son habitude. Elle commence à chanter, "New York, New York". Pas question de raccourcir ce moment : on voit deux choses durant cette séquence, elle qui chante, et lui qui la regarde. Rien d’impressionnant sur le papier. Il verse une larme à la fin. Regardez ce film.

  • Le patron de Fassbender l’a accompagné dans le dit-bar. Il finit par coucher avec Mulligan qui logeait chez Fassbender. Forcément, Fassbender le prend un peu mal, il décide d’aller courir, le reste appartient à l’histoire.


Pour finir


Quand je descend dans le salon pour annoncer à ma mère que je serai réalisateur, je lui explique que c’est parce que j’ai vu ce film. J’étais dans un état d’excitation monstrueux.

Parce qu’en fait, on a le droit de faire ce qu’on veut avec le cinéma. On a le droit de filmer un homme qui court de droite à gauche, ce qui veut dire quelque chose dans le language cinématographique, le savoir et s’en foutre, sur une musique qu’il écoute dans ses écouteurs, du Bach en l'occurrence, même si ce n’est ni pour parler du fait qu’il s’entraîne pour une compétition, ni pour le voir fuir ou courir après quelque chose. Juste, il étouffait chez lui, on ne sait pas où il va, lui non plus, il avait besoin de courir. Et à la fin, ce plan a le droit de n’aller nulle part. On peut faire ça en un seul point de vue si on s’en donne les moyens. C’est romantique en fait, il court bien et il est beau Fassbender, ça suffit.


On a le droit maman.

Bon, et bien mon premier film ça sera ça alors. Sur du David Bowie pour ma part, et l’image tremblera un peu plus. Comme j’ai pas de moto ni de SteadyCam, je le ferai bras tendu avec mon Nokia assis sur un vélo que Lucas poussera en courant pour suivre Titouan. Et il sera irregardable ce film Maman. Puis dans 3 ans je verrai un film qui s’appelle Mauvais sang, où le mec court, de gauche à droite lui, sans raison, sur Modern Love de Bowie. Du coup, entre ces deux films, il me reste plus grand chose à moi pour mon premier film maman.

Mais j’ai le droit, et je ne vais pas pouvoir ne pas le faire.


 

Quelques films ou réalisateurs importants auxquels je fais référence :

  • X-men Le commencement, Matthew Vaughn

  • Steve Jobs, Danny Boyle

  • Le Parrain, Francis Ford Coppola

  • Eternal Sunshine of the Spotless Mind, Michel Gondry

  • Hunger, Steve McQueen

  • Mauvais Sang, Leos Carax


MauvaiseLimonade

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