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  • Eva

La manipulation intellectuelle mène à la haine

Dernière mise à jour : 29 avr. 2019

La politique est un sport extrême. Il s’agit de faire de ses convictions les convictions de tous. Or, certaines convictions politiques sont construites sur un vide intellectuel. Certaines sont basées sur des ouï-dire, sur des histoires presque mystiques contées depuis des décennies. Lorsqu’un politique se met au défi de défendre une conviction dont il ne connaît pas les fondements, il se lance dans une vie de contradictions. Les politiciens défendent des idées sans vraiment les connaître, en basant leur argumentation sur des idées reçues. Mais parfois, un retournement se produit et ces politiciens se retrouvent dans des situations embarrassantes, à défendre les idées opposées de ce qui a constitué leur base politique, de ce qui a fait leur réussite.


Et c’est justement ce qui est arrivé au politicien néerlandais Joram van Klaveren qui a siégé quatre ans au Parlement néerlandais en tant que député et président du Parti pour la liberté (PVV), un parti de droite radicale. Avant d’expliquer la contradiction de Joram van Klaveren, faisons un tour d’horizon de ce charmant parti politique.


Le Partij voor de Vrijheid est un fervent défenseur d’une Europe blanche et chrétienne. Fondé en 2006 par un souverainiste nationaliste, Geert Wilders, le parti est, entre autres, islamophobe. Les députés défendent des opinions sévèrement anti-islamiques ; ils prônent l’interdiction totale et immédiate de l’immigration des pays musulmans, l’interdiction de construire de nouvelles mosquées etc. Ces députés sont pour l’introduction de loi bannissant le « Coran fasciste ». Le PVV est un parti extrémiste, mais cette vision de l’Islam ne l’empêche pas d’avoir une représentation conséquente aux Pays-Bas. Le Parlement néerlandais est constitué de 150 représentants, dont 20 sont les élus du PVV, et de 75 sénateurs, dont 9 « pour la liberté ». Bref, c’est un parti qui a une place acquise dans la politique néerlandaise. Le pays connaît ce parti, comme nous connaissons le Rassemblement National de notre chère Marine.


Le PVV est associé à la culture de la haine. Mais on peut se demander si cette haine est réellement fondée. La désinformation et la manipulation peuvent convaincre une personne qui n’est pas instruite sur la réalité de la chose. Malheureusement, la dissimulation d’information est répandue dans certains partis, dans certains groupes. Et cette manipulation intellectuelle peut être la cause de la haine. Lorsque que la manipulation prend fin, parfois grâce à une certaine instruction, on peut assister à un retournement de position. C’est d’ailleurs l’élément déclencheur de l’histoire (folle ?) de Joram van Klaveren.


Joram van Klaveren siège pendant quatre ans au Parlement néerlandais comme député. Il est aussi le président du PVV au Parlement. En 2014, il quitte le PVV et forme le groupe Bontes – Van Klaveren avec Louis Bontes, lui aussi membre du PVV. La même année, il rejoint le parti VoorNederland (Pour les Pays-Bas). Il n’abandonne pas ses leitmotivs préférés, à comprendre qu’il n’abandonne par ses revendications islamophobes. Il abandonnera cependant la politique en 2017 après une défaite électorale.


Joram van Klaveren défend corps et âme ses positions islamophobes. Après s’être retiré de la politique, il décide d’écrire un livre pour décrire les menaces de l’Islam. Ce livre est intitulé Apostat : du christianisme à l’Islam à l’heure de la terreur séculaire. Un apostat est la position d’une personne qui renonce publiquement à une doctrine ou à une religion. Joram défend la chrétienté, il diabolise l’Islam en prenant appui sur le contexte géopolitique actuel. Les différentes attaques terroristes de groupes islamiques extrémistes sont la base de son argumentation plus large sur l’Islam. Ses positions sont défendues avec des arguments plus ou moins profonds. En décidant d’écrire son apostat, Joram van Klaveren est obligé de se plonger dans la lecture des textes sacrés de l’Islam.


And here’s the tea

En se renseignant sur l’Islam et ses enseignements, Joram, un islamophobe « convaincu », a une révélation. A la lecture des textes fondateurs, l’ancien membre du PVV a découvert que ses positions étaient peut-être infondées. Ses idées islamophobes se sont retrouvées éclipsées par la révélation divine. Joram van Klaveren s’est converti à l’Islam et a réfuté les propos dégradants de son ancien parti. Son livre de réfutation de l’Islam devient une « réfutation des objections que les non-musulmans ont vis-à-vis de l’Islam ». En 2019, il annonce dans une interview qu’il reconnait désormais Mahomet comme le prophète. Joram s’est publiquement converti à l’Islam, ce qui ne va pas sans étonner ses anciens collaborateurs. Geert Wilders, son ancien patron au PVV, est très critique à l’égard de la conversion de Joram van Kleveren, il la compare à un végétarien acceptant un travail dans un abattoir.


Cette conversion récente et inattendue a soulevé de nombreuses critiques au sein de partis politique, certains politiciens allant même jusqu’à la définir de coup de pub. Mais ce n’est pas la première fois qu’un élu du PVV se converti à l’Islam. Long story short, en 2013, Arnoud van Doorn diffuse un court métrage intitulé Fitna dans lequel l’ancien député exprime sa perception de l’Islam : il cite des sourates du Coran qu’il illustre ensuite par des images de manifestations violentes des musulmans, comme des images du 11 septembre. Les retours sur ce film sont critiques. Arnoud van Doorn se penche sur les raisons de ces critiques. Il entre dans une réflexion profonde sur la rhétorique islamophobe utilisée. Il finit par admettre les torts de ce film, qui « contient beaucoup d’informations trompeuses et incorrectes qui n’ont rien à voir avec cette religion divine et son noble prophète ». Il se convertit à l’Islam et produit un film qui aborde la véritable image de l’Islam.


Ces conversions récurrentes laissent à penser que la désinformation est l’une des principales raisons – si ce n’est LA principale raison – de la haine religieuse. Joram van Klaveren – et Arnoud van Doorn – se sont laissés influencer par des partis islamophobes et ont adhéré à leurs idées sans pour autant être renseignés sur l’Islam.


Il s’agit alors de repenser la diffusion de l’information. Notre société est noyée sous des informations incessantes et incomplètes. Il faut toujours avoir le plus d’informations le plus rapidement possible. Aujourd’hui, nous voulons connaître les faits dans les lignes les plus importantes. C’est là où commence la désinformation, qui peut mener à de nombreuses dérives.

La haine découle de la désinformation, et le cas de Joram van Klaveren en est une preuve. Les partis extrémistes partagent des idées tronquées. Le PVV défend une Europe blanche et chrétienne. L’identité européenne serait mise en danger par un multiculturalisme prôné par les différentes élites politiques. En somme, le PVV prône un entre-soi. Cette idéologie est basée sur un manque d’information et sur de la manipulation. De fait, lorsque les partisans de ces idéologies sont informés sur la réalité des religions et peuples qu’ils condamnent, ils peuvent parfois passer de l’autre côté de la barrière.


Cette histoire est peut-être un simple coup de pub, mais elle reste le symbole de la désinformation omniprésente dans notre société.



Sources :

- Joram Van Klaveren, ex-député anti-islam, dit être devenu ..., AFP, Huffpost, publié le 05/02/2019

- Aux Pays-Bas, un ex-député islamophobe se convertit à l’islam, Jean-Pierre Stroobants, Le Monde, publié le 05/02/2019

- Pays-Bas : Joram van Klaveren et l’islam, conversion ou ..., Nelly Didelot, Libération, publié le 06/02/2019

- Dutch former anti-Muslim politician converts to Islam ..., Eline Schaart, Politico, publié le 04/02/2019

- Joram van Klaveren — Wikipédia

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