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  • Norita

Le goût amer des soldes, ou Comment j'ai fait des magasins un terrain de jeu

Dernière mise à jour : 25 mars 2020

Chaque année, à intervalle régulier, le même phénomène se produit. Et je ne me souviens pas de la dernière fois où je n’ai pas accueilli la période des soldes avec, au fond de moi, une pointe d’appréhension. Je n’en connais jamais la date, ça me tombe dessus sans prévenir et j’ai jamais le temps de me préparer pour cette épreuve psychologique. Et ce garçon à côté de moi en amphi qui me lance “C’est Black Friday ce week-end”. Je le regarde incrédule, mi figue mi raisin : “Parce que toi tu en connais la date ?!”. Apparement pour lui c’est évident : il va pouvoir en profiter pour acheter tout pleins de trucs dont (d’après moi) il n’a pas vraiment besoin. Alors que moi, j’angoisse.

Enfin, je devrais peut être conjuguer ça au passé. Parce que depuis quelques temps cette angoisse annuelle s’est transformée en expérience. 


 

Mais revenons un peu en arrière.


Je vous entend d’ici vous demander « mais pourquoi cette aversion pour les soldes ? ». 


Explication : les soldes, c’était tout à la fois un moment d’espoir et un constat d’échec. Et ce, quel que soit mon objectif. Si je suis sans-le-sou, je déprime : à quoi bon essayer des habits, je ne vais rien pouvoir acheter. Alors si je rentre dans un magasin j’ai la sensation de errer sans but, je n’essaye rien et je sens le regard des vendeuse sur ma nuque que j’imagine pleins de jugement (oui, j’ai une légère tendance à l’exagération et la paranoïa.. et alors?). En plus, je me dis que je vais devoir supporter le défiler de mes ami-e-s exposant fièrement leurs nouvelles trouvailles, qu’au fond de moi je jalouse (no offense, je sais pertinemment que je fais EXACTEMENT la même chose et pourtant, quand je suis spectatrice et bien je me sens un peu nulle et pendant quelques heures vous m’énervez). Si par contre j’ai un peu d’argent de côté, je me dis « chouette ! Je vais pouvoir me faire plaisir ! » et je pars en m’imaginant déjà dans une nouvelle petite tenue toute à mon avantage. Sauf qu’évidemment, soit je finis en me maudissant d’avoir dépensé autant d’argent, soit je finis triste parce que RIEN ne me va. Parce que je fais partie de ces jeunes femmes dont le corps ne correspond pas tout à fait aux normes de la mode, et que sur moi un jean slim ou un crop top et bien ça ne fait pas le même effet que sur les mannequins. (au passage j’aimerais remercier la personne qui a inventé le jean taille haute : bébé chat tu es un-e génie). Non pas que ça me touche particulièrement, je suis du genre bien dans mon corps, mais il y a quelque chose de déprimant à réaliser que le prêt-à-porter ne propose pas grand-chose d’original pour mes formes et ma mère me répète que « je pourrais faire un effort, j’ai toujours l’air habillée de la même façon ».  Et à la fin j’avoue, je finis même par me dire que « peut-être » en étant plus fine je serais plus heureuse. Enfin voilà, dans les deux cas, je suis un peu triste, un peu pas fan de mon corps, un peu pleine de regrets etc etc etc. (Moi dans ces cas là je me sens « pou ». Mais je suis activement à la recherche d’une autre expression décrivant cet état).


POURTANT (roulement de tambour, c’est là que tout bascule) : cette année, le goût amer des soldes s’est transformé en expérience body positive. 



 


Profitant d’être à Barcelone entre filles en pleine période de soldes d’hiver, vient évidemment le moment de faire les magasins. Et pour le coup, j’avais mal au pied, je faisais super gaffe à mon budget et j’imaginais d’avance ma déambulation triste entre deux piles de vêtements pendant que les filles faisaient tout un tas d’essayages. Et puis, alors qu’on se dirigeait vers le premier magasin, la chose m’a sautée aux yeux.


Pourquoi vivre ça comme un moment désagréable ? Ne pouvais-je pas au contraire en tirer parti et décider de le prendre à la rigolade ?


J’allais faire des prochaines heures une véritable expérience… 

Le mot d’ordre : sortir de ma zone de confort. Au lieu de chercher vraiment des vêtements à acheter, je me suis mise à essayer tout ce qui d’habitude n’a pas sa place dans ma garde-robe. Tous ces habits qui me plaisent sur les mannequins mais qui ne correspondent pas vraiment à mon style, ou que je projette comme « incompatibles avec ma morphologie ». Robe au col Claudine, combinaison intégrale, robe fourreau déstructurée : TOUT Y EST PASSÉ. 

Résultat : surprise et fou rire garanti ! Déjà, c’est excessivement décomplexant. Évidement que je n’allais pas acheter cette combinaison patte d’eph dont le décolleté arrivait au nombril ! Mais non seulement on a toutes beaucoup ri devant le résultat (un vrai désastre) mais en plus je sais maintenant que le lycra c’est pas pour moi.. Et en essayant une robe style bohème j’ai réalisé que les imprimés à fleurs n’étaient pas si laids.


Je n’ai rien acheté. Mais je suis sortie du magasin le cœur plus léger. Aucune déception en réalisant devant le miroir que ce petit short qui me faisait tant envie ne serait jamais taillé pour moi puisque je n’avais rien essayé de tel. Mais ça m’a donné des idées et peut-être qu’en friperie la prochaine fois mon regard sera attiré par ce que d’habitude je ne regarde même pas, tellement persuadée que « ça n’est pas pour moi » ou que « ça ne va qu’aux filles comme (insérez ici tout ce qui n’est pas vous). »


Cette petite aventure s’est finalement terminée en expérience super body positive pour moi et sortir de sa zone de confort comme ça était totalement dégrisant. Je me suis mise à essayer tout et n’importe quoi, à accepter tout ce que me tendaient mes amies et j’ai la sensation que dans l’ensemble, on s’en est donné à cœur joie. J’avais l’impression d’avoir huit ans de nouveau et d’essayer toute la garde-robe de mes parents la veille de carnaval. 

Et au-delà du jeu, j’ai eus un peu la sensation de me faire du bien à l’âme en jouant de mon corps. Plus de pression, plus de jugement, une bonne dose de rire et de la bienveillance. 

Alors si toi aussi le Black Friday qui arrive te laisse un goût amer ou que tu traînes des pieds en accompagnant quelqu’un dans les boutiques, pourquoi ne pas tourner ça à la rigolade en transformant le magasin en terrain de jeu ! Je suis sûre que tu peux être surpris-e du résultat en découvrant que non, les combi-shorts ne sont pas faites uniquement pour les filles fines, que les robes longues vont aussi aux petites et que les pulls cols roulés vont aussi bien aux torses musclés qu’aux corps fluets (et je vous laisse sur cette petite rime).

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